Une convention efficace
La Croix 1er août 2002



L'Union européenne veut collaborer avec la société civile, partenaires sociaux, milieux économiques, organisations non gouvernementales, milieux académiques etc. . Le travail en cours au sein de la Convention est un bon thermomètre de cette volonté.

Créée fin 2001 par le Sommet des Chefs d'Etat de Laeken en Belgique, la Convention a pour tâche d'examiner des questions - près de 80 ! - pour l'avenir de l'Europe des 15, bientôt des 25 puis des 27 ou 28 : rôle de l'Union, division des compétences, simplification des instruments, fonctionnement des institutions et légitimité démocratique, préparation d'une constitution.

M.Giscard d'Estaing en est le Président ; un belge et un italien sont vice-Présidents. La Convention est composée de 105 "conventionnels", représentants des Etats, des Parlements européen et nationaux et de la Commission européenne.

La Convention va travailler en trois phases : écoute, analyse, propositions pour la Conférence intergouvernementale de 2004. Nous sommes au milieu de la première phase.

Dans ce cadre la société civile est sollicitée. Jean Louis Dehaene, le vice-Président belge conduit le dialogue avec elle. Un forum Internet a été créé (cf. :http://www.info-europe.fr/). Une convention jeunesse aura lieu en juillet. Des réunions se sont tenues avec la société civile qui a été invitée à présenter ses contributions lors de la session plénière de la Convention des 24-25 juin 2002. Et le travail se poursuivra à chaque étape semble-t-il.

Certains eurosceptiques grincheux critiquent la Convention pour cause de déficit de représentativité en particulier à propos de ces contacts avec la société civile. C'est étonnant car les huit groupes de travail - Caritas Europa était présente dans les groupes Secteur social, Droits de l'homme, Développement - ont permis à 400 organisations de contribuer aux débats. Bien sûr beaucoup d'entre elles ont la pratique de relations avec l'Union européenne, mais les contenus des contributions exposées lors de la séance manifestent un esprit de coopération constructive et critique, parfois un peu trop bien pensant, très rarement complaisant.


Quelques exemples donnent une idée de la tonalité des débats et des principaux sujets abordés.

En matière sociale, l'élaboration d'indicateurs sociaux communs aux pays européens permet le rapprochement de leurs politiques ; ils pourraient devenir des indicateurs d'inclusion sociale.

L’intégration de la Charte des droits fondamentaux au futur traité constitutionnel est vivement souhaitée. Cette Charte approuvée lors du Sommet de Nice en décembre 2000 réunit " les droits fondamentaux en vigueur au niveau de l'Union de manière à leur donner une plus grande visibilité et marquer leur importance exceptionnelle".

Cette idée de sa reprise dans le futur traité se retrouve dans tous les travaux, certains voulant une révision du texte pour renforcer les droits et les garanties, alors que d’autres redoutent qu'une réouverture des débats conduisent à leur réduction. De nombreux participants souhaitent que le rôle de la société civile soit reconnu et qu'un espace de dialogue formel avec elle soit mis en place.

Les services d'intérêt général à caractère par exemple social ou médical gérés par les associations, fondations, mutuelles, etc. sont complémentaires des services publics et du marché ; ils doivent être reconnus et soutenus. L'Etat doit se concentrer sur la garantie des doits sociaux et créer un environnement permettant à la société civile de fournir les services nécessaires.

En matière de migrations, une politique cohérente implique la reconnaissance des liens entre les migrations et les politiques de l'Union européenne, telles le commerce ou le développement. Un nécessaire engagement à la solidarité internationale en découle logiquement, par la création de structures et de règles internationales au service d'un développement mondial solidaire. Le groupe traitant de l'environnement et de l’agriculture ne dit malheureusement rien des effets nocifs des subventions de la politique agricole commune sur la situation des paysans des pays en voie de développement : ils sont concurencés dans la vente de leurs productions par des compétiteurs subventionnés.

En matière de droits de l'homme, l'Union doit soutenir la toute nouvelle Cour pénale internationale. Le respect des droits de l'homme nécessite la transparence et la responsabilité des institutions ainsi qu’une politique d'égalité des sexes. Mais dans l'ensemble les droits humains sont abordés d'un point de vue surtout national d'abord.

Plusieurs intervenants ont émis des avis contradictoires quant à la nécessité de faire référence à la tradition chrétienne dans le futur traité constitutionnel.

Plus largement, l'Union européenne est vue comme une Union de valeurs ; leur protection et leur promotion doivent être placées au cœur des politiques européennes internes et externes. Il faut encourager les actions qui développent un sentiment d'appartenance culturelle européen.

Les débats ne font que commencer, mais ils sont bien engagés. Cette collaboration entre l’Union européenne et la société civile participe à la fabrication de plus de bonne Europe.

Denis Viénot
Président de Caritas Europa