Elargissons l’Europe solidaire


La Croix 28 juillet 2000 Madrid, Luxembourg, Varsovie, Saint Petersbourg. D'Ouest en Est, quatre exemples d’activités sociales qui démontrent la nécessité pour l'Union européenne de mieux prendre en compte toutes les réalités continentales.

A Madrid un centre d'accueil pour personnes sans domicile fixe situé face au Sénat reçoit chaque jour des hommes et des femmes qui peuvent s'y doucher, y laver leurs vêtements. Ils se rencontrent et échangent en petits groupes animés par des bénévoles ayant bénéficié d'une formation psycho-sociale et soutenus par une forte équipe de salariés. Un certain pari de réinsertion fonctionne. La municipalité finance une bonne partie des dépenses.

Au Luxembourg, un accueil de jour convivial rend les mêmes services. Il est animé par une assistante sociale et des bénévoles. Les personnes sans domicile y trouvent un espace de vie et de relations. Là, le système de protection sociale finance le projet.

Dans la banlieue de Varsovie la Caritas tient un centre d'hébergement pour SDF dans une ancienne usine prêtée par la ville. Les personnes sont serrées dans un vaste atelier, mais une grande salle sert de réfectoire et de lieu de rencontre. Deux salariés dont une spécialiste de l'alcoolisme, de la drogue et du Sida sont épaulés par des bénévoles. La solidarité de voisinage fonctionne: un boulanger fournit gratuitement du pain, et le dimanche des gâteaux.

A Saint Petersbourg, un vieux bâtiment administratif héberge une soupe populaire pour SDF tuberculeux. Il est mis à disposition de la Caritas par la municipalité moyennant un loyer modeste: c'est justice car il a fallu le remettre en état. Quatre-vingt cinq personnes y reçoivent chaque jour leurs traitements, prennent ensuite un déjeuner et repartent avec quelques provisions pour le soir. L'immense majorité est constituée d'anciens prisonniers. L'alcoolisme fait rage. Une femme docteur bénévole, quelques salariés: c'est le seul endroit de la ville où des SDF tuberculeux sont soignés. Les aides budgétaires proviennent de Caritas de l'Ouest et de particuliers allemands.

Au sein des pays qui vont adhérer à l'Union Européenne, telle la Pologne, les financements sociaux publics n'ont pas encore d'équivalent généralisé comme chez les Quinze. Les autorités de ces derniers sont effrayées par le coût des adhésions à venir. Dans le cadre très économique et juridique des négociations en cours sur le processus d’élargissement de l’Europe, il faudra trouver des solutions, sans négliger les dépenses sociales car les conséquences humaines doivent en être assumées.

Par ailleurs, l'Europe peut voir avec satisfaction se profiler un début de redémarrage économique dans quelques zones russes, les régions de Moscou et des grandes villes particulièrement, qui cependant ne résoudra pas à court terme la pauvreté de masse ou le drame des enfants de la rue. Et la misère règne dans les campagnes et les petites villes

Peut-on rester indifférent aux énormes problèmes sociaux russes? 25 à 30% de la population est en situation de grande pauvreté. Des politiques européennes de coopération doivent être renforcées dans ces domaines. En Russie, elles pourraient s'appuyer sur le désir croissant de fondation d'un Etat de droit.

Il est souvent dit que l'Europe a avantage à l'exercice de la solidarité internationale. Nos voisins européens russes, pas si lointains, sont aujourd’hui concernés par nos choix. L’Union européenne a donc raison de débloquer des aides pour les trois ans à venir, comme elle vient de le faire.