QUELQUES ENJEUX DE LA SOLIDARITE

Les plus pauvres souffrent de ne pouvoir se vêtir, si nourrir, se loger, en France, en Europe, dans le Tiers Monde. Même si nous n'aimons pas cela, notre mission est d'assister, non pas en opposant assistance et promotion, mais en veillant scrupuleusement à ce que cette assistance soit le premier pas d'une relation qui conduise à la promotion et à la libération.

Situons quelques aspects du contexte dans lequel nous évoluons et de celui dans lequel nous allons évoluer : la démographie, la pauvreté du Tiers Monde, l'évolution de la protection sociale.

La population des villes augmente en pourcentage plus rapidement que la population totale; Ce phénomène va aller en s'accélérant dans les pays du Nord, mais augmentera encore plus vite dans ceux du Sud.

De telles concentrations conduisent à l'éclatement des solidarités sociales, à la délinquance, à la mauvaise hygiène, à la pénurie de logements et d'infrastructures, à l'instabilité politique.

A ce déséquilibre s'ajoute celui des migrations, résultant des contrastes entre la répartition des populations et celle des niveaux de vie et des potentiels économiques : Deux zones coexistent, l'une de décroissance démographique et de richesses, l'autre d'explosion démographique et de pauvretés.

Les pays du Nord verront donc arriver sur leur sol des migrants de plus en plus nombreux, notamment africains.

Paradoxalement, c'est d'autant plus l'intérêt des sociétés occidentales qu'elles devraient souffrir de manque de main d'oeuvre dans une trentaine d'années, d'après les prévisions actuelles. Nous ne pouvons nier les réalités et nous aurions avantage à préparer l'accueil des migrants et à construire une société intégratrice !

Les pauvres du Tiers Monde sont beaucoup plus pauvres que ceux de nos pays développés. Dans de nombreux pays la situation a peu de chance de s'améliorer si nous restons passifs. Le cas de l'Afrique est à cet égard le plus significatif.

Le développement réel du Tiers Monde passe par le développement significatif des investissements productifs, publics et privés, permettant la création d'emplois et de richesses. Les plus pauvres ne doivent pas être exclus.

Les actions des Caritas y contribuent : formation des hommes et des femmes, développement rural, micro-industries urbaines, programmes de santé.

La question se pose de l'équilibre de nos engagements entre Tiers Monde et Europe de l'Est où les besoins sont réels mais d'une autre nature. Il faut très clairement dire que l'Europe de l'Est n'est pas le Tiers Monde. Notre rôle sera plus d'accompagner les Caritas dans leui travail de solidarité, de mise en place de réseaux et de formation des cadres. Les pauvres du Tiers Monde ne seront pas délaissés ; leurs espoirs de promotion sont notre compas et les équipes internationales du Secours Catholique prousuivront leurs engagements et les amplifieront.

La pauvreté augmente dans les sociétés développées. De plus la stratification des statuts sociaux s'accentue. Il y avait les actifs, les retraités et les chômeurs indemnisés, et puis les autres. Actuellement se développent des multitudes d'états incertains, emplois précaires, "RMistes" bien connus de nos réseaux, parents isolés, etc.

L'Etat Providence se fragilise. Les dépenses de retraite et de santé vont progresser encore el il assurera de plus en plus mal la lutte contre la pauvreté et le soutien des familles ayant charge d'enfants.

Aussi, certains parlent maintenant de l'Etat subsidiaire, remplaçant l'Etat Providence. Le Secours Catholique sera présent dans ce débat sur le rôle nécessaire de l'Etat et des collectivités locales qui semblent vouloir la sous-traitance vers les associations et leurs bénévoles sans leur donner ou leur laisser les moyens d'agir.

A partir de ces divers constats, le Secours Catholique a choisi de porter son effort à long terme sur un certain nombre de points.

Il est évident que l'action en milieu urbain sera d'une de nos grandes préoccupations, tant en France que dans le Tiers Monde.

La ville, les énormes villes du Tiers Monde, les bidonvilles, les banlieues, où l'environnement humain et naturel est sinistré, sont des lieux fondamentaux d'engagement. Il en est de même du monde rural confronté à des problèmes de sur-production en France et de sous-oroduction dans beaucouo de oavs du Tiers Monde.

Dans le domaine de l'urgence, nous n'oublierons pas l'action en France lors de mini­catastrophes. Ici, comme à l'étranger, cette action ne se bornera pas au secours immédiat mais sera suivie d'un engagement à plus long terme visant la réhabilitation.

Le Secours Catholique mènera aussi une action à propos de l'environnement et des conséquences de ses déséquilibres. C'est manifeste dans le Tiers Monde et en Europe de l'Est. C'est vrai également en France et en lien avec l'urbanisation, et la désertification du monde rural.

Nous continuerons notre action envers l'Etat et les collectivités locales. Notre action institutionnelle en France, en Europe, et dans le Tiers Monde en soutien de celles des Caritas, ne nous conduit pas à faire cause commune avec l'Etat quel qu'il soit. Il s'agit d'une démarche libératrice dans sa nature, incarnée à partir de nos actions concrètes de court terme et de long terme, à laquelle nous essaierons d'associer les pauvres. Nous devons développer notre action institutionnelle européenne avec les Caritas d'Europe. De nombreux enjeux de demain se jouent en effet à Bruxelles et à Strasbourg.

Nous comptons développer notre action auprès des pauvres, qui en France comme dans le Tiers Monde ont des capacités créatrices d'organisation, d'aide mutuelle, de travail ensemble, d'échange de compétences, de partage.

Face à la difficulté du contexte, nos actions témoignent de l'engagement des trois réseaux qui sont notre originalité et notre efficacité, celui des bénévoles, celui des donateurs et celui des Caritas.

Depuis quelques années le Secours Catholique, voulant rendre plus concrète son option préférentielle pour les pauvres, développe son action d'accompagnement. Il a constaté qu'une attitude d'écoute et de disponibilité permet bien souvent au pauvre de s'exprimer, de dire ses sentiments, ses aspirations, de sortir ainsi de sa solitude et de reprendre confiance en lui-même et en la vie.

Cette présence, complémentaire de l'action plus spécifiquement sociale représente une force inestimable de solidarité.

Devant les perspectives que nous avons évoquées, et afin de soutenir nos nombreux projets à court ou à long terme, nous nous devons de développer encore nos réseaux, réseaux généralement spécialisés dans l'action en France dans le monde urbain ou rural, ou dans l'aide au oavs du Tiers Monde.

En Europe de l'Est, comme dans les Caritas des différents pays, nous développerons l'aidt structurelle que nous leur apportons déjà afin que tous puissent créer, former et développe] leurs propres réseaux.

Telle est l'ambition positive à laquelle le Secours Catholique se sent appelé.

Denis VIENOT